Le 25 mai 2025, le porte-avions CNS Liaoning, accompagné de deux destroyers lance-missiles et d’un navire ravitailleur, a quitté les côtes chinoises pour une traversée stratégique. En longeant Taïwan, puis en passant à travers l’archipel disputé des Senkaku, le groupe naval chinois s’est aventuré jusqu’à Minamitori, l’île japonaise la plus orientale, au cœur du Pacifique occidental. Des manœuvres aéronavales y ont été menées, démontrant la capacité de projection offensive de la marine chinoise.
Tokyo sur ses gardes
Face à ce mouvement, le Japon a réagi avec prudence mais fermeté. Le secrétaire général du gouvernement, Yoshimasa Hayashi, a indiqué que des “communications appropriées” avaient été transmises à Pékin, tout en assurant que la situation était suivie de près. Le ministère de la Défense a confirmé que d'autres bâtiments chinois, dont le porte-avions Shandong, un destroyer et un navire de surveillance électronique, opéraient également dans les eaux japonaises après avoir quitté la zone économique exclusive des Philippines.
Une réponse à l’alliance Washington-Tokyo-Manille-Canberra
Ces démonstrations militaires interviennent quelques semaines après les exercices Balikatan, menés en mer de Chine méridionale, auxquels ont participé plus de 17 000 soldats américains et philippins, ainsi que des unités japonaises et australiennes. Ces manœuvres illustrent la montée en puissance d’une coalition quadrilatérale cherchant à contenir l’expansion maritime de Pékin dans la région.
La Chine, en retour, intensifie sa présence militaire au-delà de la "première chaîne d’îles", cette série de positions stratégiques incluant Taïwan, Okinawa et les Philippines, traditionnellement considérée comme une barrière à sa liberté d’action navale. Pékin s’inscrit désormais dans une logique de contournement, opérant de plus en plus dans la “seconde chaîne” allant du Japon à la Papouasie-Nouvelle-Guinée, région aussi sous influence américaine.
Tensions croissantes avec la Corée du Sud
Simultanément, la Corée du Sud s’alarme de l’installation par Pékin de plusieurs structures (dont une ancienne plateforme pétrolière) dans les eaux du golfe de Corée sans concertation préalable. Le 23 juin, l’Assemblée nationale sud-coréenne a voté une résolution qualifiant ces installations de “menace pour la sécurité maritime”, avec un soutien bipartisan.
Un rapport du CSIS (Centre d’études stratégiques et internationales) a mis en lumière la possibilité d’un double usage — civil et militaire — de ces installations, ce qui ne fait qu'accroître les suspicions à Séoul.
Un message à double détente
À travers ces actions simultanées — pressions sur le Japon et défi sécuritaire envers Séoul —, Pékin envoie un signal fort : malgré ses différends commerciaux ou diplomatiques, la Chine reste capable de mobiliser rapidement ses forces navales et de défier l’ordre régional dominé par les États-Unis.
Alors que l’administration Trump concentre ses ressources sur la reconfiguration sécuritaire européenne et la crise récente entre Israël et l’Iran, la Chine teste les limites de l’engagement américain en Asie-Pacifique. La mer Jaune, les îles Senkaku et le Pacifique central deviennent les nouveaux baromètres de la rivalité sino-occidentale.