L’Union Européenne et le Royaume-Uni ont officialisé un accord commercial en matière de défense et de sécurité, dans le cadre d’un pacte économique plus large, après plusieurs années de relations tendues sur le plan politique en raison du Brexit.
Lors d’une conférence de presse organisée aujourd’hui à Londres à l’occasion du sommet UE-Royaume-Uni, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a annoncé qu’un nouveau partenariat en matière de défense avait été conclu avec le Royaume-Uni. Celui-ci vise à renforcer la coopération et couvrira plusieurs domaines clés : l’industrie, la mobilité militaire, les opérations de maintien de la paix, la gestion des crises ainsi que la lutte contre les menaces hybrides.
Von der Leyen a précisé que ce pacte militaire représente « une première étape » vers la participation britannique aux programmes et initiatives de défense de l’UE. Toutefois, elle a ajouté qu’« une deuxième étape » sous forme de négociations complémentaires serait nécessaire avant que l’industrie britannique ne puisse prétendre à des appels d’offres conjoints, notamment dans le cadre du projet SAFE (Security Action for Europe), doté de 150 milliards d’euros (169 milliards de dollars).
Selon un document intitulé « Common Understanding », signé également aujourd’hui, « le Royaume-Uni et la Commission européenne devront rapidement explorer toutes les possibilités de coopération renforcée mutuellement bénéfique qu’offre l’instrument SAFE, une fois celui-ci adopté, dans le respect de leurs cadres juridiques respectifs ».
Cet accord s’inscrit dans le cadre de l’initiative ReArm de l’UE, qui prévoit jusqu’à 800 milliards d’euros pour accélérer les dépenses de défense et renforcer les capacités industrielles sur le continent. SAFE permettra notamment aux États membres de contracter des prêts pour financer de nouveaux équipements majeurs.
« SAFE améliorera notre réactivité, comblera les lacunes militaires et, surtout, renforcera notre interopérabilité », a ajouté von der Leyen. « Il créera aussi de nouvelles opportunités pour nos industries de défense ».
Depuis le Brexit en 2020, le retrait du Royaume-Uni de l’Union avait empêché les fournisseurs britanniques de concourir pour les contrats de défense proposés par Bruxelles. Même si Ursula von der Leyen n’a pas précisé de calendrier pour de futures négociations, cette avancée laisse entrevoir des perspectives significatives pour des entreprises comme BAE Systems, Babcock et Rolls Royce.
Dans une déclaration à la presse, Kevin Craven, directeur général de l’organisation britannique ADS Group, a qualifié ce pacte de « développement positif, bien qu’encore un peu décevant par son manque de précisions ». « On nous assure que cela ouvrira la voie à la participation de l’industrie britannique au fonds SAFE et soutiendra ainsi des milliers d’emplois au Royaume-Uni, mais il est prématuré de s’en réjouir alors que les détails concrets restent à définir », a-t-il ajouté.
De son côté, Antonio Costa, président du Conseil européen, a tenu un discours plus enthousiaste. Selon lui, ces accords « marquent non seulement un progrès, mais un nouveau chapitre dans la relation entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne, avec le début d’un partenariat stratégique renouvelé et renforcé ».
« Ces accords ne sont pas que des mots sur le papier », a-t-il poursuivi. « Ils sont le reflet de nos engagements communs en matière de sécurité, de prospérité, de développement et au service des citoyens des deux côtés de la Manche ».
En matière de défense, Costa a souligné que « ce nouveau partenariat apportera une coopération approfondie, renforcera la contribution de l’Europe à l’OTAN et affinera notre attention sur les priorités stratégiques communes, notamment dans le commerce ».
Les deux parties travailleront également ensemble à « assurer une paix juste et durable » en Ukraine, tout en annonçant vouloir « intensifier la pression sur le président russe Vladimir Poutine via de nouvelles sanctions ».
Enfin, le Premier ministre britannique Keir Starmer a salué cet accord commercial global comme « historique », estimant qu’il « offre au Royaume-Uni un accès sans précédent au marché de l’Union Européenne, le meilleur obtenu par un pays extérieur à l’UE ou à l’Afrique, tout en respectant les lignes rouges de notre manifeste : pas de retour dans le marché unique, pas d’union douanière et pas de liberté de circulation ».
Dans une analyse publiée ce jour, Ed Arnold, expert en sécurité européenne au think tank britannique Royal United Services Institute, s’interroge toutefois sur « le niveau d’ambition » de ce partenariat de défense UE-Royaume-Uni, soulignant « l’absence d’objectifs concrets et d’échéances ».