Les thermes romains : immersion dans les bains publics de l’Antiquité


Debout au milieu des vastes ruines des thermes de Caracalla à Rome, des centaines de mouettes tournent en cercle, leurs cris résonnant comme un écho des voix d’il y a 1800 ans. Aujourd’hui, ce gigantesque complexe de bains publics, autrefois l’un des plus grands de Rome, est principalement désert, parfois utilisé pour des représentations d’opéra. Mais à quoi ressemblaient ces thermes dans leur splendeur d’antan ? Et pourquoi les Romains étaient-ils si passionnés par les bains publics ?

Des bains publics partout dans la ville

En vivant presque un an à Rome, on remarque les vestiges des thermes quasiment à chaque coin de rue. Chaque empereur en construisait, et au milieu du IVe siècle, on comptait 952 bains publics dans la ville. Le plus grand fut celui de l’empereur Dioclétien, qui pouvait accueillir jusqu’à 3 000 personnes par jour dans son complexe de 13 hectares.

Les thermes comprenaient plusieurs salles aux températures différentes :

  • Le caldarium, pièce chauffée par des conduits d’air sous les sols brûlants où l’on portait des sandales spéciales.

  • Le tepidarium, pièce tiède attenante.

  • Le frigidarium, avec un bassin d’eau froide.

Un immense bassin extérieur de 4 000 mètres carrés constituait souvent la pièce maîtresse. On y trouvait également des gymnases, des bibliothèques, des restaurants et des espaces d’exercice.

Un lieu de vie sociale et de détente

Le philosophe Sénèque, conseiller de Néron, décrivait autour de l’an 50 après J.-C. l’agitation joyeuse des thermes : des gens soufflant en soulevant des poids, des plongeons dans les bassins, des commerçants criant leurs prix et des chants impromptus.

Les aristocrates y arrivaient parfois avec une cinquantaine de serviteurs, disposant de zones réservées où ils exhibaient vêtements et bijoux précieux. Malgré cela, les bains étaient largement accessibles à tous les milieux sociaux, grâce à des tarifs bas voire gratuits lors de fêtes ou campagnes politiques.

Hommes et femmes fréquentaient les thermes à des heures distinctes, certains complexes possédant des espaces exclusivement féminins. Le médecin Soranus d’Éphèse recommandait même aux femmes enceintes de s’y rendre avant l’accouchement.

Dans une cité aussi dense et polluée que Rome, les thermes offraient un véritable havre : eau chaude, parfums, massages, ambiance de spa. Comme le disait une inscription du Ier siècle : « bains, vin et sexe rendent la vie digne d’être vécue ».

La dure réalité derrière la splendeur

Si les thermes étaient des lieux de plaisir, ils étaient aussi marqués par la réalité de l’esclavage. Ce sont souvent des esclaves qui réalisaient les travaux les plus ingrats : nettoyage des cendres, vidage des latrines, entretien des canalisations. Ils accompagnaient leurs maîtres aux bains, les massaient à l’huile et leur nettoyaient la peau avec des strigiles (racloirs). Ils entraient par une porte séparée.

Une institution à travers l’Empire

Les thermes n’étaient pas l’apanage de Rome. On en trouve dans toutes les villes de l’Empire romain : de Aquae Sulis (l’actuelle ville de Bath en Angleterre) à des vestiges impressionnants en Afrique du Nord, en Espagne ou en Allemagne. Certains complexes militaires fournissaient aux soldats un confort bienvenu, comme ceux du mur d’Hadrien en Grande-Bretagne.

À Chester, en Angleterre, les vestiges montrent la présence de caldaria, frigidaria et même de sudatoria, sortes de saunas.

Une tradition millénaire

Les Romains n’ont pas inventé les bains publics — les Grecs les avaient déjà. Mais ils ont élevé cette pratique à une échelle inégalée, faisant des thermes un symbole de la culture romaine. Cette tradition a perduré à travers les siècles, notamment sous l’Empire islamique et plus tard sous les Ottomans. Aujourd’hui, les hammams turcs, directement hérités des thermes romains, restent une institution sociale importante. Istanbul en compte encore une soixantaine en fonctionnement.

Les thermes romains, avec leur architecture ingénieuse et leur rôle social, unissaient les habitants de tous horizons. Tandis que les mouettes tournent au-dessus des ruines des thermes de Caracalla, leurs cris semblent nous relier à ce monde disparu.

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