L’État islamique du Mozambique étend ses opérations et ses tactiques


Le groupe État islamique au Mozambique (ISM) étend sa zone d’opérations et diversifie ses tactiques.

Au cours de l’année écoulée, les terroristes ont quitté leurs bastions situés autour des villes de Macomia, Mocímboa da Praia et Muidumbe, dans le nord-est de la province de Cabo Delgado, pour mener des attaques ou être repérés dans 14 des 15 districts de la province.

Cette vague d’attaques s’est également étendue à la province voisine du Niassa, à l’ouest de Cabo Delgado. Les experts estiment qu’une série d’attaques très médiatisées démontre la résurgence du groupe, sa confiance retrouvée et son objectif de hausser sa visibilité.

Deux raids meurtriers contre des sites touristiques et de protection de la faune dans la province de Niassa ont ainsi été menés dans un but de « propagande », selon Fernando Lima, chercheur pour l’observatoire du conflit Cabo Ligado. Il explique que ces attaques contre des lieux touristiques ont attiré bien plus l’attention des médias internationaux que celles contre des villages locaux.

Le 19 avril, un groupe de 40 combattants de l’ISM a attaqué le luxueux camp de chasse Chapungu-Kambako dans la réserve spéciale du Niassa. Les assaillants ont décapité deux employés, pris plusieurs otages et occupé les lieux pendant cinq jours.

« Après avoir capturé quatre employés, les insurgés ont exigé une rançon de trois millions de meticais pour leur libération, demande rejetée en raison des règles internationales contre le financement du terrorisme. En conséquence, les terroristes ont incendié le camp principal, » rapportait le journal Carta de Moçambique le 24 avril.

Dix jours plus tard, des insurgés ont attaqué le centre environnemental Mariri dans le district de Mecula, toujours dans le Niassa. L’État islamique a revendiqué l’attaque, affirmant que six soldats avaient été tués, plusieurs autres blessés, un avion incendié et un stock d’armes capturé.

Le Niassa Carnivore Project (NCP), un programme de protection de la faune basé à Mariri, a confirmé l’attaque, précisant que deux de ses patrouilleurs anti-braconnage — probablement pris pour des soldats — avaient été tués et que deux autres étaient portés disparus.

Près de 2 000 habitants du village voisin de Mbamba ont fui dans la brousse, selon le NCP. Il s’agissait de la première incursion significative du groupe terroriste dans la province du Niassa depuis 2021.

« La valeur propagandiste de l’attaque est importante, car elle démontre la capacité du groupe à ses membres, à de potentiels recrues et au réseau plus large de l’État islamique, » soulignait Cabo Ligado dans son rapport hebdomadaire du 7 mai. « Ces attaques montrent aussi la capacité de l’ISM à varier ses tactiques et à frapper loin de ses zones habituelles autour de Macomia. Elles risquent également d’impacter davantage l’industrie touristique du pays. »

L’analyse des attaques dans le bulletin hebdomadaire al-Naba de l’État islamique mettait en avant leur impact sur les communautés locales, l’emploi, les coûts de sécurité et de reconstruction, ainsi que la probable chute du tourisme. Même si le secteur de la chasse au Mozambique n’a pas l’ampleur de ceux d’Afrique du Sud ou de Tanzanie, ces attaques nuisent à la réputation du pays.

Le 3 mai, des terroristes ont tendu une embuscade à un groupe de soldats des forces de défense du Rwanda (RDF) près du village de Notwe, dans le district de Mocímboa da Praia, faisant trois morts et six blessés.

« Les RDF sont mieux équipées et mieux entraînées que les forces armées mozambicaines (FADM), et jusque-là, les insurgés hésitaient à s’en prendre directement à elles en raison des risques encourus, » indiquait la société de conseil en sécurité Executive Research Associates. « L’embuscade du 3 mai démontre la confiance croissante de l’ISM dans sa capacité à affronter ces forces. »

Le 10 mai, le navire hydrographique Atlantida a lancé un signal de détresse après avoir essuyé des tirs de combattants de l’ISM près de l’île de Tambuzi, dans le district de Mocímboa da Praia. Le navire est parvenu à s’échapper sans dommage.

« L’attaque contre l’Atlantida témoigne de la confiance croissante de l’ISM dans les opérations proches des côtes et reflète sa présence renforcée dans les eaux littorales de Cabo Delgado, » indiquait Cabo Ligado dans une mise à jour du 21 mai. « Cet incident révèle une volonté et une capacité à aller au-delà des pillages et prises d’otages. »

Le projet Armed Conflict Location and Event Data (ACLED) a enregistré au moins 80 attaques de l’ISM au cours des quatre premiers mois de l’année, hausse partiellement attribuée à la fin de la saison des pluies rendant les routes praticables.

Les responsables des FADM et des RDF affirment travailler à améliorer la communication et la coordination entre leurs armées, mais un officier mozambicain, sous couvert d’anonymat, a déclaré à l’AFP que la concentration des forces à Cabo Delgado permettait aux insurgés de facilement mener des opérations dans la province de Niassa.

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